Discipline spectaculaire mais peu médiatisée, le BMX français a brillé cet été aux Jeux Olympiques de Paris, avec un triplé historique chez les hommes. Tout le monde se souvient de cette soirée du 2 août 2024 où Joris Daudet, Sylvain André et Romain Mahieu ont ébloui la planète à Saint-Quentin-en-Yvelines. Un véritable coup de projecteur, pour un sport qui en a bien besoin. Mais où en est le BMX quelques mois plus tard ? Tour d’horizon en Indre-et-Loire.
Sport dans lequel les Français brillent chaque année à l’international, le BMX est pourtant rarement mis en lumière dans l’Hexagone. À l’inverse de ses disciplines “soeurs” comme le cyclisme sur route ou le cyclo-cross, il n’est pas, ou très peu, retransmis à la télévision. Seuls les grands championnats, comme les Mondiaux ou les JO, trouvent leur place dans le paysage médiatique sportif.
Pourtant, avec des égéries comme Christophe Lévêque, Thomas Allier et plus récemment Joris Daudet, tous multiples champions du monde, et un format télégénique, la mayonnaise aurait pu prendre. Avec environ 20 000 licenciés dans l’Hexagone, répartis dans 264 clubs affiliés à la Fédération Française de Cyclisme (FFC), et des résultats au plus haut niveau, la France est une nation phare du BMX.
Quelle résonance en Indre-et-Loire ?
En Indre-et-Loire, la discipline est bien installée. Créé en 1983, l’Indoor de Tours rassemble tous les deux ans des pilotes des quatre coins de la France. En 2025, pour la 26e édition, pas moins de 1 687 pilotes ont répondu présent, un record.
Il faut dire que le BMX brille dans le 37, avec pas moins de neuf clubs, dont Joué-lès-Tours. Créé en 1985, le club jocondien évolue aujourd’hui en Division Nationale 1. Promue après son sacre de DN2 en 2023, l’équipe entraînée par Alexis Gambier et Hugo Dorval a réalisé la meilleure saison de son histoire l’an passé, terminant 4e.
Le club compte notamment dans ses rangs deux anciens champions de France avec Vincent Pelluard (2013) et Corentin Dubois (2023) et surtout une double championne olympique, avec la Colombienne Majiana Pajon, en or à Londres en 2012, à Rio en 2016, et en argent à Tokyo en 2020.
Proposant une pratique allant du loisir au plus haut niveau à ses plus de 200 adhérents, le BMX Club de Joué s’inscrit comme une véritable locomotive pour la discipline en Indre-et-Loire.
Descartes, le deuxième club d’Indre-et-Loire
Derrière Joué-lès-Tours, le club de Descartes est bien installé. Située tout au sud du département, à la limite de la Vienne, cette petite bourgade d’à peine plus de 3 000 habitants est un lieu important du BMX en Indre-et-Loire. “Avec 150 licenciés, on est le deuxième club du département et le cinquième de la région”, nous lance Vincent Rouget, le président.

Malgré le temps brumeux et les maigres degrés d’un matin de février, ce passionné est fidèle au poste au moment d’ouvrir les portes du club. “Aujourd’hui, on accueille le Stade Bordelais. Ils nous louent la piste en vue de la Coupe de France”, explique Vincent autour d’un café bien chaud et d’une spécialité de la Vienne : des broyés du Poitou. Les 22 et 23 mars, le BMX Descartes accueillera les manches 1 et 2 de la compétition. 1 750 pilotes attendus, un record, et pas moins de 3 000 à 3 500 personnes sur site, la population du bourg va doubler le temps d’un week-end.
Une sacrée organisation pour un club entièrement bénévole. “On installe des buvettes, des stands de restauration, on ferme les routes. Au total, une Coupe de France c’est environ 70 000 à 80 000 € à mettre sur le papier”, raconte Vincent. “Heureusement, la mairie nous aide et on a également des sponsors, sinon on ne s’y retrouverait pas”.
Organisé pour la troisième fois après 2017 et 2021, cet événement est un coup de projecteur important pour le club, situé à une heure de Tours et confronté à la distance avec la capitale de la Touraine. “Quand les enfants commencent à aller au lycée ou en études supérieures, ça devient difficile de les retenir ici. Le but est de les envoyer vers d’autres clubs, où ils auront des possibilités d’évolution”.

Majoritairement composé de jeunes, le BMX Descartes se veut un club formateur. “Mon objectif est de leur apprendre à faire du vélo, notamment en campagne, pour la mobilité”, raconte Vincent. “On fait découvrir le BMX en travaillant dans les écoles le savoir-rouler. C’est une forme de civilité”.
Avec une hausse d’engouement cette année, il espère poursuivre sur cette voie. “On a eu 52 nouvelles adhésions, ce n’était jamais arrivé, j’ai même cru que ça allait coincer avec nos créneaux”, explique Vincent. Il y voit un ruissellement des JO sur les clubs. “Les jeunes ont tous la finale en tête avec Joris Daudet et le triplé français. Je ne sais pas s’ils viennent spécifiquement pour ça, mais on voit que ça les a marqués. C’est une bonne chose pour le BMX”.
Une situation qui se vérifie par les chiffres. Selon la FFC, la discipline aurait enregistré une hausse de près de 21 % de licenciés au 31 octobre 2024, par rapport à la même date l’année précédente. Une progression encore plus marquée chez les femmes, avec un bond de 23 %.
L’AS Chanceaux BMX, un club en pleine croissance
Un phénomène que l’AS Chanceaux BMX a également connu ces dernières années. “Il y a eu un engouement année après année avant les JO. D’une quarantaine de licenciés à mon arrivée en 2012, on est passé à environ 115 aujourd’hui”, raconte la présidente, Sylvie Beaufils, alors que les premiers pilotes arrivent pour l’entraînement du jour, malgré un ciel chargé de nuages en cette fin d’après-midi hivernale.

Un effectif qui a presque triplé en une dizaine d’années. “On a même dû fermer les inscriptions cette saison”, ajoute Sylvie. “Je ne sais pas si c’est uniquement l’effet des Jeux de Paris”, déclare Marc, ancien président et toujours investi dans le club. “Depuis l’arrivée du BMX comme sport Olympique en 2008, il y a une plus grande médiatisation, et ça se répercute sur les clubs. Aujourd’hui, les effectifs augmentent dans tout le département”.
Un engouement auquel l’ASC a dû s’adapter. “On a quatre séances dans la semaine : trois groupes le mercredi après-midi, trois groupes le samedi matin, et un entraînement spécifique le lundi et le jeudi”, explique Marc. “À l’heure actuelle, on ne peut pas faire plus”. Aujourd’hui, place aux U9, sous la direction de Maël. Une heure au programme, et ce ne sont ni le froid, ni les gouttes de pluie qui vont empêcher cette joyeuse bande d’aller rouler sur la piste.
En plein dynamisme, Chanceaux veut également en profiter pour s’attaquer à un gros projet. “On voudrait refaire le revêtement des lignes de la piste et retravailler les bosses. Il nous reste également deux virages en enrobé à faire”, explique Sylvie. Faite en diorite, la piste est sujette aux intempéries et s’abîme facilement. En libre accès, elle est également victime de dégradations lorsque certains viennent avec des quads ou des voitures télécommandées. “Heureusement, cela n’arrive pas souvent”, assure Marc.
À hauteur de 46 000 €, ces travaux représentent un coût important pour le club. “On devrait sortir 10 000 € en fonds propre et on espère financer le reste par des subventions, le mécénat privé et des dons”, explique Sylvie “On espère pouvoir le faire cet été”. Le club a d’ailleurs lancé une cagnotte Ulule pour faire appel aux particuliers.

Alors que les parapluies des parents se ferment au moment où les nuages ont fini de déverser leur chagrin, Sylvie explique l’importance du projet de refonte de la piste pour l’ASC. “Ce n’est pas facile de garder nos pilotes quand vous avez des clubs comme Joué-lès-Tours ou Saint-Avertin, qui ont plus de moyens. En modifiant la piste, on espère rester attrayants pour nos riders”.
“On est le seul club du nord de Tours”, ajoute Marc. “C’est un argument important, on peut attirer une autre population. Pour cela, il faut que nous continuions à pouvoir nous développer”. L’ASC organisera d’ailleurs le 26 avril prochain le championnat départemental, leur deuxième compétition au niveau FFC. “Avant la piste n’était pas homologuée par la Fédération”, explique Sylvie. “On avait seulement le droit de faire des compétitions Ufolep”.
Une catégorie où le club brille, puisque Chanceaux est triple champion régional en titre. “On espère conserver le titre une année de plus”, déclare la présidente au moment de fixer les objectifs pour 2025. “Si on peut également amener des pilotes au niveau national, avec les Indoors ou le Trophée de France (championnat de France des jeunes), ce sera une réussite”. Pour l’heure, place à la fin de l’entraînement sous un ciel toujours aussi menaçant, mais qui ne trouble en rien la bonne humeur dans ce club familial.
Saint-Genouph, un petit poucet en reconstruction
Changement de décor à Saint-Genouph. En cette fin d’hiver, pas de pluie aujourd’hui. Au contraire, place à un temps printanier. Les manteaux sont rangés et les tee-shirts sont même de sortis pour certains, alors que le soleil se couche tranquillement sur ce petit village d’à peine plus de 1 000 habitants.

Créé en 2010, le club G2X a bien failli disparaître, avant que Marjorie Ludeau ne reprenne les rênes en 2023. “C’est un vrai challenge. À l’époque, il n’y avait même pas dix licenciés. Aujourd’hui, on est une bonne vingtaine, de 6 à 18 ans”, raconte la nouvelle patronne.
Pour remettre le club sur le droit chemin, il a fallu tout remettre en place. “Notre vrai problème, c’est que nous n’avions pas d’entraîneurs, ils me demandaient tous une rémunération”, raconte Marjorie. “J’avais l’avantage de connaître un coach de la DN de Joué-lès-Tours, qui a accepté de venir entraîner pour nous”.
Le club emploie désormais deux entraîneurs jocondiens pour la séance du vendredi et propose un deuxième créneau le mercredi, sous la supervision des parents. “On a aussi deux coachs bénévoles pour les draisiennes le samedi matin”, explique Marjorie. Une catégorie qui n’existait pas avant l’arrivée de la nouvelle présidente aux commandes.

Alors que le monde afflue pour la séance du jour, Marjorie se réjouit de voir ses pilotes et leurs parents répondre présent chaque semaine. “Tu vois, c’est ça qui me fait plaisir”, lance-t-elle. “Voir tout ce monde arriver le sourire aux lèvres et repartir avec la même expression, peu importe leur âge. C’est ce que je recherche ici. On est un club qui donne ce côté familial, l’ambiance est top”.
“Nous sommes plus dans le loisir que dans la performance”, concède-t-elle. “Ce n’est pas un problème, même si c’est vrai que la compétition fait avancer un club”. Mais pour le moment, le principal au G2X est de retaper le club, avant de penser aux résultats sportifs. “On manque de bénévoles”, regrette Marjorie. “On doit réhabiliter la piste, installer une grille de départ, mais le mauvais temps ne nous a pas permis de le faire jusqu’à présent”.
“J’aurais aimé pouvoir le faire en mars, l’objectif est désormais avril ou mai”, avance Marjorie. “Cela devrait permettre de développer le club”. En effet, sans grille de départ, impossible pour le G2X d’accueillir des compétitions, ni même de s’entraîner correctement. Une situation qui freine probablement l’arrivée de nouveaux licenciés.

Toutefois, la présidente se veut optimiste quant à l’avenir de son club. “Je suis assez confiante, je pense que quand notre piste sera refaite et qu’on aura la grille de départ, on va pouvoir augmenter les inscriptions”. Pour le moment, place à la distribution des nouveaux maillots du club, dans la joie et la bonne humeur, avant un entraînement sous le soleil couchant qui devrait ravir la famille G2X.