Rhum arrangé, Whisky, Pastis… la production de spiritueux s’empare de la Touraine

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Après les brasseries artisanales, c’est maintenant aux distilleries et aux fabriques de rhum arrangé d’investir la Touraine. Alors comment tirer aujourd’hui son épingle du jeu dans une activité en plein essor ? Reportage. 

Il y a une dizaine d’années, la Touraine a connu une montée fulgurante des brasseries. Aujourd’hui, ces établissements font partie intégrante du décor tourangeau avec pas moins d’une dizaine juste dans la métropole de Tours. 

Mais maintenant, il semblerait que la tendance se tourne vers un autre domaine : la boisson spiritueuse.

En effet, depuis quelque temps, la mode est à la production de whisky, de rhum arrangé, de gin ou encore de pastis. On peut par exemple parler du vigneron de Saint-Nicolas-de-Bourgueil, Hervé Morin, qui, fin juin 2025, a lancé la commercialisation de son premier whisky entièrement fait en Indre-et-Loire. Il y a aussi la Fabrique Héritier, installée depuis l’été 2022 du côté de Montlouis-sur-Loire, proposant à la vente leur gin, whisky, brandy et pastis. 

Parmi les nouveaux arrivants, la Distillerie Belladone, portée par trois bons copains à Sorigny, en périphérie tourangelle, entend se démarquer dans cette “nouvelle mode”. Tout est dans le nom. En prenant celui d’une plante herbacée, Emeric, Marie et Rémy tentent de tirer leur épingle du jeu en prônant une philosophie tournée vers le travail des plantes et du bio. 

Créée fin 2024, la mini-distillerie a réellement commencé à vendre depuis mars 2025. Proposant gin, pastis, menthe et cordial, c’est avec passion que Emeric Derrien concocte et produit, seul, ses différentes recettes à base de produits biologiques dans son local, dans la zone Isoparc de la Vallée de l’Indre. 

Après avoir passé 15 ans dans la communication à Amboise, c’est en profitant d’une dégustation de spiritueux avec des amis que le trentenaire a eu le déclic : “Dans les dernières années où je travaillais dans mon ancienne boîte, je n’avais qu’une envie : partir dans un autre domaine, plus manuel. Je me suis d’abord essayé au domaine viticole mais je ne voyais pas trop le bout du tunnel avec tous les aléas climatiques et surtout le côté financier”, raconte Emeric.  

Grand passionné de cuisine, le jeune homme se plaît, grâce à sa distillerie, à tenter tous les jours de nouvelles recettes avec des ingrédients originaux comme du citron noir séché, du poivre de Timut (aussi appelé “poivre pamplemousse”) ou encore des feuilles de combava, couramment utilisé comme aromate en cuisine. Il compte d’ailleurs sur bon nombre de son entourage pour goûter ses nouvelles expériences. Dans une volonté de toujours surprendre, le nouveau distillateur réfléchit même aujourd’hui à produire et commercialiser en édition limitée du gin au basilic frais. 

Grâce à un stage de 2 semaines passé chez Disent-elles, une distillerie axée sur le réemploi en Charente-Maritime, Emeric a également découvert les eaux-de-vie naturelles. C’est ainsi que, pour se démarquer des distilleries “plus classiques”, le jeune homme s’est lancé dans la production d’eaux-de-vie de bière et de vin. Le but : revaloriser des vins rouges ou des bières fermentées défectueux et donc invendables en l’état. Ces derniers sont ainsi macérés, distillés puis remacérés avant d’être commercialisés dans des petites bouteilles de 50 centilitres. “Ce sont bien sûr des produits plus élitistes qui sont donc plus difficiles à vendre pour les cavistes, explique Emeric, c’est pour ça que je cible davantage les restaurateurs et la vente directe et que je ne fais que des productions limitées.”

En parlant de commercialisation, étant à ses débuts, la Distillerie Belladone peine aujourd’hui à faire une marge satisfaisante sur ses produits. Entre les taxes, le coût des matières premières, les marges des cavistes, difficile pour l’instant de proposer un prix attractif tout en y tirant un bénéfice très satisfaisant. “C’est compliqué aussi de fidéliser une clientèle quand on vend du spiritueux. A la limite, la menthe, si le client la trouve bonne et qu’elle n’est pas trop sucré pour lui, il aura sûrement tendance à revenir. Mais pour le pastis en revanche, c’est plus compliqué parce qu’on a plus envie de découvrir d’autres marques que de rester sur le même produit”, relate Emilien, qui souhaite pour l’instant se concentrer sur la Touraine concernant ses ventes. 

Une stratégie d’implantation solide qui se retrouve également quelques kilomètres plus loin, à Monts, chez Tonton Copain. 

Entreprise artisanale spécialisée dans la production et la vente de rhums arrangés depuis 7 ans, la société tenue par Franck Plaine et Aude Seigneurin a pour objectif de proposer des produits raffinés et gourmands à partager, grâce à un processus de macération lente hors-bouteille et des choix de produits innovants. 

Anciennement propriétaires du parc de loisir La Récréation pendant 15 ans et enseignants de métier, le couple de Montois met toute sa passion dans ses produits depuis la création de son premier rhum arrangé, qui pour l’anecdote est partie d’une erreur : 

“C’était vers 2016-2017 quand on avait encore le parc d’attractions La Récréation. J’ai ma nièce qui est arrivée avec une bouteille de rhum Bologne et un sachet de fruits de la passion en disant : « Tu m’as dit que c’était facile de faire du rhum arrangé, moi j’ai essayé, c’était raté, alors explique-moi comment on fait. » Les personnes présentes ce jour-là ont écouté les explications et ont dit : « Mais vous n’allez pas vous arrêter à faire du rhum passion, il faut qu’on en goûte à plein d’autres trucs ! » Et il y a eu une sorte de hobby familial.”

Pour proposer des rhums arrangés gourmands et longs en bouche (limités à 30° d’alcool maximum), Tonton Copain utilise le rhum Bologne, produit à Basse-Terre en Guadeloupe, pour sa note aromatique équilibrée et sa douceur. Pour le reste, Franck et Aude ne jurent que par des épices, des fleurs et des fruits frais (sauf pour la mangue, la rose et l’hibiscus où ils utilisent des produits séchés). 

Tout comme la Distillerie Belladone, Tonton Copain compte sur l’essai et l’erreur pour confectionner ses recettes. Celles-ci sont ensuite produites sur place et commercialisées en grande majorité en vente directe à la boutique ou lors d’événements extérieurs comme la Ferme Expo ou la Foire d’Orléans. Et ce en plus d’une distribution limitée chez des cavistes de Touraine. 

Avec une production de 3 500 litres de rhum arrangé par an, l’entreprise se considère comme une petite fabrique qui n’a pas vraiment pour objectif de se développer massivement ou d’entrer dans la grande distribution. “On veut rester une niche pour les gens qui nous ont découvert et qui vont partager ça avec les autres, explique Aude, ce que l’on veut c’est laisser le temps au temps et de patienter, que ce soit pour trouver les bons parfums, pour faire macérer nos rhums, pour trouver des nouvelles recettes. On ne se presse pas non plus pour trouver des nouveaux clients.”

Si aujourd’hui, le couple d’enseignants vit pleinement à travers leur projet-passion, il n’empêche qu’il prend conscience de la difficulté que suscite la gestion d’une telle entreprise. “Avec l’immobilisation du rhum pendant 8 mois quand il est en macération, c’est 8 mois où vous ne pouvez pas le vendre, donc c’est toute une gymnastique, raconte Franck, on pensait qu’on reviendrait sur nos pieds avec l’argent qu’on avait injecté dans l’entreprise, mais non. Il y a toujours de l’argent à mettre dans l’immobilier, ou dans d’autres choses. On est des artisans, pas des commerciaux donc on apprend encore tous les jours.” 

Pour en savoir plus sur le travail de Tonton Copain, vous pouvez jeter un œil à notre article sur Info-tours

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