Sur le secteur de l’agro-alimentaire, l’Indre-et-Loire est plutôt un petit poucet par rapport aux autres départements du Centre Val-de-Loire. Le département occupe la dernière place dans le classement régional du nombre de salariés dans cette industrie. On en compte seulement 1 103 contre presque 6 000 pour le Loiret. Une situation qui n’empêche pas certaines entreprises tourangelles de briller à l’échelle régionale, nationale voire internationale. C’est le cas par exemple de Balarama, basée à Fondettes. On est allé visiter les coulisses.
Vous ne le savez peut-être pas mais les barres protéinées rangées dans vos placards ont potentiellement été fabriquées à deux pas de chez vous.
Balarama est née en 1985. D’abord basée à Compiègne dans l’Oise, cette entreprise familiale a rejoint la zone d’activité La Haute Limougère à Fondettes en 2000, avant d’intégrer le groupe Daco Bello, spécialisé dans les fruits secs. C’était en 2020.
Recherche et développement, logistique, fabrication, facturation… Tout le processus de production est tourangeau.
Avec 20 millions de barres produites par an, elle est devenue un des leaders du secteur de la barre alimentaire à l’échelle nationale. Sur le marché, les prix de ses barres alimentaires varient autour de 3€50 (dont 50 centimes reviendrait à Balarama). Aujourd’hui, l’entreprise collabore avec unecinquantaine de marques, soit la moitié des clients potentiels sur le territoire : “Nous avons multiplié notre portefeuille clients par 2,5 depuis 2020 et nous avons pour objectif d’atteindre la barre des 100 clients et 11 millions d’€ de chiffre d’affaire d’ici mars 2029”, explique le directeur général, Dominique Renault.
Une expertise unique
Balarama est une entreprise qui propose des services en marque blanche. Cela veut dire que les produits fabriqués à Fondettes sont vendus sous le nom d’une autre marque. Ainsi, vous ne verrez jamais de barre alimentaire avec le nom Balarama sur l’emballage.
Ces dernières sont essentiellement des sociétés vendant des produits spécifiques dans des magasins spécialisés (par exemple comme Décathlon pour les barres hyperprotéinées). Balarama privilégie notamment des collaborations à long terme, de 5 à 10 ans.
Balarama se définit comme une entreprise cultivant une approche sur-mesure. « Notre cœur de métier, c’est de fabriquer des barres différentes chaque jour, en fonction des besoins spécifiques de nos clients », explique Dominique Renault. À contre-courant d’une production de masse, elle privilégie l’expertise et l’adaptabilité. Aucun “catalogue” n’est proposé aux clients potentiels. C’est à eux de donner un “brief” de ce qu’ils souhaitent vendre afin que Balarama conçoive, par la suite, une recette spécifique qui répond à cette demande.
Balarama se distingue par son refus de travailler à l’aveugle : « Si nos clients ne savent pas ce qu’ils veulent, nous ne faisons rien », décrit Dominique Renault.
Au total, chaque année, ce sont 50 recettes conçues à partir de 400 matières premières, dans des formats allant de 17 à 85 g selon les publics visés. Le tout est soutenu par un travail de recherche et développement quotidien, avec à une équipe dédiée, incluant deux ingénieurs en diététique.
La R&D fait partie des grands points forts de Balarama. Les chiffres parlent d’eux-même : 543 échantillons de nouveaux produits présentés à ses clients en 2024. Balarama a aussi été pionnière dans la fabrication de produits issus d’agriculture biologique. Dès 1986, elle a commencé à produire ses premières barres bio. Pour rester compétitive, l’entreprise s’appuie sur des études de marché ciblées et suit les grandes tendances de consommation : alimentation bio, produits à faible transformation (par exemple en remplaçant le sirop par du miel ou en faisant des barres salées, environ 5% de la production)…
Elle travaille également sur des marchés émergents comme la nutrition pour enfants ou ce qu’on appelle en jargon marketing la « silver nutrition », destinée aux seniors. Le marché du troisième et quatrième âge est aujourd’hui, pour Dominique Renault, une opportunité à saisir pour le futur :
“Cette population renferme des enjeux majeurs car, selon des études, 92% des enfants d’aujourd’hui seront des centenaires. C’est pour cela que nous sommes, déjà en ce moment, en train de collaborer avec deux grands groupes de marques.”
Une gamme centrée sur la “beauty food” est également en élaboration. Par exemple, Balarama a travaillé sur des barres agrémentées en collagène, une protéine souvent vantée pour lutter contre le vieillissement de la peau et des articulations ou encore pour avoir de beaux cheveux.
Un processus de fabrication réfléchi
Quand on entre dans l’usine, l’odeur de sucré chatouille les narines. Une fois les matières premières assemblées, c’est tout un cheminement qui attend chaque barre de céréale. Deux lignes de production s’opposent : une s’occupe des barres à mouler et l’autre celles découpées à partir de plaques. Sur les deux sections, tout va très vite et tous les mouvements des machines sont millimétrés. Tous les 5 mètres, un employé surveille si tout se passe bien entre les différentes étapes de production.
Travail des matières premières, assemblage des ingrédients, passage au froid pour durcir le produit (jusqu’à -19°C), découpe, emballage… C’est une véritable chorégraphie. Même chose pour la partie conditionnement.
Avant d’être disposée dans sa boîte, chaque barre doit passer sous une sorte de radar. Celui-ci contrôle si chaque produit pèse le même poids que celui inscrit sur l’emballage. Trop lourde ? Trop légère ? La barre est mise à part, comme l’explique Dominique Renault : “On ne va évidemment pas tout jeter à la poubelle. On va par exemple donner quelques produits aux employés ou les transférer à des associations caritatives locales.” Ce radar va également surveiller si aucun corps étranger n’est présent dans le produit (comme du métal par exemple).
Les deux lignes de production fonctionnent en deux fois 8 heures, de 5h à 13h et de 13h à 21h. Cela pendant 5 à 5 jours et demi par semaine. Rien n’est laissé au hasard. Il se passe 40 minutes, montre en main, entre le début de la production d’une barre et sa sortie en emballage. C’est pour ça que l’équipe de conditionnement commence, chaque matin, trois quarts d’heure plus tard que l’équipe “cuisine”.
Un développement international ambitieux mais non sans difficulté
Actuellement, la majorité des ventes de Balarama se concentre sur le marché français. Mais l’entreprise ambitionne de renforcer sa présence en Europe, notamment en Angleterre, en Allemagne, en Italie ou encore en Espagne. Cependant, elle n’ignore pas qu’elle doit faire face à une concurrence féroce, comme des industriels d’Europe de l’Est (Bulgarie, Macédoine,…), dont les volumes de production peuvent atteindre 700 millions de barres par an. Un marché tellement concurrentiel que Balarama ne peut pas dévoiler la liste de ses clients. Pendant, notre visite de ses locaux, l’entreprise nous a clairement interdit de prendre en photo les emballages ou la marque des machines.
Cette ambition de développement va notamment passer par un processus de recrutement renforcé. Aujourd’hui, Balarama compte 33 collaborateurs dont les deux tiers sont consacrés à la production (pour un tiers consacré à la Recherche et Développement). Cependant, l’entreprise avoue connaître des difficultés à recruter. Pour Dominique Renault, le problème viendrait en partie du manque de connexion de la Zone d’Activité au réseau de transport Fil Bleu : “On a de très bons profils qui sont prêts à nous rejoindre mais quand ils voient la difficulté que c’est de se rendre à l’entreprise en bus, ils rebroussent directement chemin.”
En plus de se développer en matière d’effectifs, Balarama ambitionne de s’étendre avec un projet de construction d’extension d’ici 2027-2028. Objectif : atteindre 50 salariés et le pallier des 30 millions de barre produites par an.