Entre faste et doute : rentrée contrastée pour les études supérieures en Touraine

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D’un côté il y a l’école de commerce Excelia qui affiche son bâtiment flambant neuf, écoresponsable, équipé d’un rooftop avec vue imprenable sur le quartier des Deux-Lions de Tours, et des alentours. De l’autre il y a l’Université qui n’est pas en reste sur les projets immobiliers mais où les discours transpirent l’esprit de la rigueur. Etat des lieux d’une rentrée tourangelle aux dissemblances frappantes.

« Cette école est la première en France à être construite en bois et paille sur 5 niveaux » se félicite d’entrée de jeu Excelia qui vient d’inaugurer son nouveau campus aux Deux-Lions, à Tours-Sud. Revendiquant déjà 1 200 étudiantes et étudiants, espérant franchir la barre des 1 500 élèves dès 2026, et dimensionné pour en recevoir 2 000, l’école de commerce claironne ses ambitions à coups de superlatifs : « Notre campus n’est pas un simple projet architectural. Il incarne notre volonté de réinventer le système d’enseignement grâce à des pédagogies innovantes et immersives » écrit le directeur Bruno Neil dans le dossier de presse.

En visitant les étages, guidé par une élève, 37 degrés découvre l’amphithéâtre de 200 places, les salles aux aménagements modulables (et louables par des entreprises extérieures) ou les petits recoins pour s’isoler en call… jusqu’à l’incontournable toit-terrasse du sommet offrant une pleine vue sur le quartier et le Cher. Chaque étage est baptisé sur le thème d’un continent, sans oublier d’avoir nommé l’une des pièces au nom de l’émirat de Dubaï (on est bien dans une école business).

Edifié en deux ans, le projet est chiffré à 18 millions d’€, témoin de l’investissement conséquent qu’Excelia flèche vers Tours, 5 ans après son arrivée sur les cendres de l’ex-ESCEM. On nous parle de salles de cours connectées avec écrans interactifs, caméras intelligentes, de micros au plafond et même d’un écran immersif inédit en France. 2 millions d’€ ont été consacrés à ces nouvelles technologies, soit plus de 10% du budget total.

Pendant le parcours, le vice-président métropolitain chargé de l’enseignement supérieur Thierry Chailloux ne masque pas son vif intérêt. Excelia n’est pas la seule bonne nouvelle de son mandat mais assurément la plus grandiloquente un an après l’inauguration du campus Pont-Cher (Brassart…) et alors que l’on attend toujours l’officialisation de l’école qui s’installera dans l’ancienne clinique Saint-Gatien près de la cathédrale de Tours.

Pour autant, faut-il forcément aller chercher du côté du privé pour s’extasier devant du neuf ? A l’Université de Tours aussi, on bâtit. Le projet fleuron c’est le futur site de Polytech (32 millions d’€), Portalis (4,4 millions) sans oublier les Tanneurs avec l’achèvement de la première tranche de rénovation à 22,7 millions d’€ incluant la réouverture de la bibliothèque (tout sera inauguré d’ici janvier). Il y a même « ce qui ne se voit pas » aka de la rénovation énergétique, notamment à Grandmont (la fac de sciences).

Dans le discours, on nous affiche aussi une adaptation au monde ultra connecté avec une large prise en compte des enjeux liés à l’intelligence artificielle, une volonté accrue d’internationalisation, le développement d’un cursus pharmacien-ingénieur ou robotique-santé sans oublier l’implication dans les enjeux environnementaux (un Erasmus autour des sciences de l’insecte).

« On est attractifs » ne manque pas de répéter le nouveau président de l’Université Philippe Roingeard… qui se débat vite avec ses démons : « on est en sous-dotation chronique, un problème qui se surajoute au contexte budgétaire. Les projets n’auront pas la même dynamique si l’Université n’est pas soutenue à la hauteur de ses besoins. »

Le discours n’est pas nouveau mais d’année en année il prend un peu plus d’ampleur à mesure que les possibilités se contractent. « Au niveau dotation on est 1 000€ en dessous de la moyenne nationale par étudiant » rappelle la présidence de l’Université de Tours, ce qui fait un total de 32 millions d’€ en moins car on compte 32 000 inscrits cette année dans l’établissement (la grande majorité à Tours mais aussi 800 à Blois + les différents instituts de formation infirmiers).

« Nous sommes l’une des 10 universités les plus sous-dotées en France et nous n’avons pas de solution de rééquilibrage » pointe encore Philippe Roingeard qui se doute bien que son dossier n’est pas prioritaire au ministère alors que la ministre démissionnaire ne peut prendre aucune initiative et que l’actualité de l’Etat est au serrage de ceinture puissance 10.

Alors on fait avec les moyens du bord en rognant sur des sujets pourtant essentiels comme la mise en accessibilité des locaux pour les personnes en situation de handicap « décalées »« Pour l’instant on essaie de préserver les emplois et les formations mais le contexte budgétaire est de plus en plus contraint » nous dit-on en évoquant la préparation du budget 2026 espéré moins en déficit que les 16 millions d’€ du BP 2025 (un trou largement lié aux opérations immobilières).

Avec une capacité de financement de 23 jours, quand on lui impose minimum 15 jours, l’Université de Tours n’est pas à l’agonie et dispose encore de larges réserves. Mais tout est dans le « pour l’instant » : « Si ce n’est pas dans l’emploi qu’on fait des économies c’est dans l’investissement car on fait déjà énormément d’efforts sur le fonctionnement quotidien. On peut toujours en demander plus mais à un moment on arrive à l’étiage minimum » détaillent Philippe Roingeard et son équipe de direction évoquant « une injustice » alors même que Tours est une des universités comptant le plus de boursiers (quasiment 25% de l’effectif).

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