Aéroport de Tours : des chiffres « records » en 2025, vraiment ?

Facebook
Twitter
Email

Responsable de la gestion de l’aéroport de Tours, la société Edeis a publié lundi 6 octobre un premier bilan chiffré de la fréquentation 2025. Le communiqué est dithyrambique annonçant « des taux de remplissage records » ou encore « des résultats nettement supérieurs à ceux des années précédentes ». Nous avons regardé les données de près.

Le sujet de l’aéroport de Tours c’est un peu le débat éternel dans les différentes instances politiques locales. Dans le cadre de la campagne des élections municipales de Tours, le candidat Horizons Henri Alfandari évoque par exemple la nécessité d’y développer au moins 5 lignes commerciales. A Tours Métropole, le président Frédéric Augis a récemment annoncé l’existence de discussions avec une compagnie qui pourrait proposer des vols réguliers moins gourmands en argent public que ce qu’exige la low cost irlandaise Ryanair. Pendant ce temps, des écologistes continuent de torpiller le soutien public à la plateforme, sans contester son utilité pour les vols sanitaires du CHU de Tours.

Reconduite en 2023 pour une durée de 12 ans, la société Edeis – gestionnaire du site – est au cœur des discussions. Le renouvellement de sa Délégation de Service Public s’est notamment fait sur la promesse d’une augmentation du trafic commercial pour passer de 200 000 à 325 000 passagers par an à Tours. Pour l’instant, on en est loin : si l’objectif des 200 000 personnes transportées est maintenu, la progression n’est pas à l’ordre du jour.

Ainsi, la tentative de lancer des lignes vers Nice, Bastia, Ajaccio ou Milan s’est avérée être un échec, la compagnie L’Odyssey étant incapable de faire décoller les avions loués à un prestataire malgré un démarrage des réservations jugé encourageant. Dans la foulée, Ryanair – principal acteur commercial de l’aéroport de Tours – a supprimé sa liaison hivernale avec Londres dès la fin de ce mois d’octobre 2025. Pire, actuellement Tours ne figure pas dans son programme estival 2026. Aucun vol après le 31 mars alors que Poitiers, Nantes ou Bergerac ont vu les réservations ouvrir.

A ce stade, il faut rappeler que Ryanair est actuellement en conflit avec la France suite à l’augmentation des taxes sur les billets d’avion, ainsi qu’une multiplication des grèves du contrôle aérien entraînant retards et annulations de vols. Par exemple, la low cost irlandaise a supprimé ses activités à Strasbourg pour ouvrir non loin de là à Sarrebruck en Allemagne. Tours pourrait alors être une victime collatérale de cette guerre comme Nîmes. Mais il faut aussi rappeler que la saison 2024-2025 a été marquée par une demi-douzaine de détournements d’avions empêchés d’atterrir à cause de la météo. Autant de frais annexes pour Ryanair qui a pu – peut-être – se lasser et limiter les frais ?

Dans ce contexte, l’arrivée d’un communiqué triomphant d’Edeis ce lundi 6 octobre détonne. 3 jours après l’annonce du programme estival 2026 de Ryanair dont Tours est absent, le délégataire se félicite de « taux de remplissage records » et de « résultats nettement supérieurs à ceux des années précédentes » pour les vols vers et depuis Tours. « On est le seul pays en Europe où l’aviation ne progresser pas donc c’est une trajectoire très positive » commente la directrice de la stratégie et du développement Aéroports Edeis, Victoire Totah.

Les chiffres les voici : 136 000 passagers de janvier à août 2025 contre 133 000 sur la même période un an plus tôt. Avec 3 000 personnes de plus, la hausse est indéniable, mais à mettre en perspective avec la progression du nombre de vols Ryanair : 790 en 2024, 804 en 2025. Ainsi, quand on calcule, on constate qu’il y avait en moyenne 168 sièges occupés par avion sur les 8 premiers mois de 2024 et 169 pour la même période un an plus tard. C’est une progression, mais légère.

Dans le détail, on constate d’ailleurs une baisse du taux d’occupation moyen des vols Ryanair Tours-Marrakech et Marrakech-Tours (176 personnes à bord en 2024, 172 cette année). Cependant, avec 187 places par aéronef, cela donne un taux de remplissage supérieur à 90% quand le seuil de rentabilité de Ryanair est estimé à environ 80%. Même Londres qui obtient une moyenne de 149 passagers par trajet remplit cet objectif. En parallèle, les vols exceptionnels vers la région italienne des Pouilles et le Monténégro ont affiché des réservations « retentissantes, proches de 100% » pendant la haute saison. Edeis espère d’ailleurs lancer deux nouvelles destinations en 2026 : « Des discussions sont en cours » affirme Victoire Totah.

Bref, incontestablement, ces chiffres sont bons, grâce notamment au renforcement de la ligne vers Marseille qui fonctionnait quasiment 7 jours sur 7 cet été (264 avions contre 230 en 2024). Certains départs se feraient carrément avec 98% de réservations, moins les no show (passagers qui ne se présentent pas) ou les personnes refoulées si leurs papiers ne sont pas en règle. En revanche, la réduction du programme marocain (172 vols en 2024, 146 un an plus tard) et la suppression de Londres dès novembre risque bien d’empêcher Tours d’atteindre le seuil des 200 000 personnes accueillies cette année.

Si l’aéroport de Tours est attractif, et qu’Edeis continue d’y voir « une porte d’entrée dynamique du Centre-Val de Loire » ce discours commercial se heurte à une réalité dans laquelle le client Ryanair impose ses choix et où l’arrivée de nouveaux partenaires sembler tarder à se concrétiser. L’entreprise se veut rassurante : « Les dernières discussions avec Ryanair indiquent que leur programme 2026 ne sera pas finalisé avant début novembre. Ils sont en pleine réflexion, en attente notamment des décisions budgétaires. On discute, on a des contacts très réguliers avec eux » promet Victoire Totah qui s’attend tout de même à une réduction de la voilure, « car leur stratégie est de diminuer leur présence en France ».

La directrice stratégique d’Edeis promet que sa société est en contact avec Volotea, Easyjet, Transavia ou encore des compagnies régionales mais reconnait que « lancer de nouvelles lignes est compliqué car elles mettent du temps à être rentables ». Pour y parvenir quand même, « Tours est inscrit dans l’association européenne de l’aviation et nous avons une rencontre la semaine prochaine avec les offices de tourisme et des agences de voyage » précise Victoire Totah.

Un degré en plus :

Edeis surveille aussi les suites de l’échec de L’Odyssey. Selon la direction, elle suit les différentes plaintes déposées et indique que des remboursements ont encore eu lieu récemment.

Facebook
Twitter
Email

La météo présentée par

TOURS Météo

Inscription à la newsletter