Ce mardi 25 novembre, le collectif Pas d’Enfant à la Rue de Tours manifestait devant le Palais des Sports du Sanitas à la sortie du match de volley entre Tours et Tourcoing. Un rassemblement pour demander des solutions d’hébergement d’urgence pour 44 enfants sans solution de logement. En pleine trêve hivernale, de nombreuses personnes demeurent privé de toit pérenne, et ce malgré les moyens renforcés mis à disposition par la préfecture.
Alors comment trouver davantage de débouchés pour les SDF tourangeaux ? Ces dernières années, des solutions d’urgence ont été trouvées comme l’ouverture de gymnases, ou la réquisition du centre d’entraînement situé près du stade de la Vallée du Cher. Pour diversifier les pistes, la ville de Tours a également lancé une campagne inédite avec plusieurs associations début novembre autour d’un slogan percutant : A Tours, pour n’avoir plus personne à la rue, il n’y a pas 36 solutions, il y en a 3 500.
Ce chiffre de 3 500 correspond à l’estimation du nombre de locaux vides dans la ville. Etabli à partir de chiffres de l’INSEE, il concerne autant les logements entièrement inoccupés que les chambres d’amis ou les bureaux vacants la nuit. Et justement, une association s’est donné pour mission d’encourager les entreprises à accueillir des personnes sans domicile la nuit ou le week-end. Etablie un peu partout en France via 40 antennes, Les Bureaux du Cœur s’est créée en 2020. Mary est sa première bénévole à Tours.
Expliquez-nous le fonctionnement de l’association ?
Le principe, c’est vraiment de partager un espace de travail. Très concrètement, ça peut être un clic-clac dans une salle de réunion. S’il y a un bureau fermé qui peut être utilisé, c’est possible, mais ça peut aussi être dans un coin de l’open space avec juste de quoi dormir convenablement : un lit ou un clic-clac + une petite armoire pour mettre quelques affaires en journée, sachant que sur les heures de bureau le clic-clac redevient canapé et peut servir aux salariés pour leur pause. La personne invitée repart faire sa journée, et les employés sont à leur tâche.
C’est quand même une certaine organisation…
Il y a évidemment toute une période de préparation. On va avoir une structure qui se propose d’accueillir d’une part, un invité qui a été identifié d’autre part, et une structure partenaire sociale, qui peut être associative ou publique, qui suit déjà la personne ou qui va suivre la personne pendant tout le temps de l’accueil. On organise une rencontre entre toutes ces personnes-là pour vérifier que le courant passe bien, que tout le monde se sent à l’aise. Ensuite, l’entreprise va expliquer à l’invité quels sont ses modes de fonctionnement, quels vont être les horaires, comment on accède au bâtiment, est-ce qu’il y a un système d’alarme, un badge, une clé… L’idée étant que l’invité soit plutôt autonome pour arriver et repartir, avec une confiance évidemment qui lui est accordée, mais aussi un principe de sécurité qui est maintenu par l’entreprise selon ses propres règles.
C’est donc un système qui fonctionne sur la confiance.
On peut imaginer bien sûr que si les règles n’étaient pas respectées, l’entreprise a le droit de dire « Nous, en fait, on n’est pas satisfaits ». Dans les faits, ça se passe majoritairement très, très bien. L’invité est bien sûr ravi d’être accueilli, de respecter les règles qui sont des règles de bon sens : avoir bien replié l’espace le matin pour que l’équipe puisse arriver et travailler, donner de ses nouvelles si jamais la personne ne rentre pas pour que les gens ne s’inquiètent pas. Respecter l’hygiène des locaux. Au-delà de tout ça, l’idée, c’est une mise en relation, qu’il puisse y avoir un croisement le matin autour d’un café, des échanges. Il y a de très belles histoires d’entreprises qui ont aidé l’invité à refaire son CV, parfois à retrouver un emploi, parfois même qui l’ont embauché.
Est-ce que le projet est actif en Touraine aujourd’hui ?
Ça a pris quelques temps, mais ça y est : on a fait le premier accueil début novembre. Une entreprise de Saint-Cyr-sur-Loire, Diego (une holding dans l’industrie des viande, ndlr), accueille une jeune femme qui arrive de Mongolie et qui n’avait pas encore de solution de logement. C’est une dame qui est en formation. Elle part la journée faire sa formation, elle était vraiment ravie d’être accueillie, soulagée de pouvoir dormir au chaud dans un contexte sécurisant. Au niveau national, ce sont 800 personnes qui ont été soutenues par 350 entreprises.
Une goutte d’eau pour le moment, mais avec l’ambition de faire tâche d’huile ?
En fait, il y a déjà d’autres entreprises ou associations qui sont en train de faire les démarches pour devenir hôtes. Parfois c’est très rapide, comme ça a été le cas à Saint-Cyr, parfois ça prend un petit peu plus de temps, ça peut bloquer légèrement au niveau de l’assureur. Donc après, il faut soit négocier, soit, comme pour une entreprise que j’accompagne, aller voir d’autres assureurs parce qu’ils veulent vraiment devenir hôtes dans le cadre des Bureaux du Cœur. Une fois qu’on a dépassé ce cap-là, on peut le devenir. Là, j’ai déjà quelques structures, et évidemment on en attend d’autres. J’ai une autre dame qui, suite à une séparation, se retrouve à la rue et aimerait vraiment être accueillie pour pouvoir, pendant quelques mois, se reposer, se sentir en sécurité.
Des situations humaines touchantes ?
On a des travailleurs précaires qui dorment dans leur voiture, des personnes qui, suite à une séparation, se retrouvent sans logement, des femmes victimes de violences, des étudiants en situation précaire, des personnes réfugiées régularisées ou en cours de régularisation, mais qui n’ont pas de solution de logement, ou en tout cas pas immédiate. Ce sont toutes des personnes en situation de précarité mais qui ont forcément un projet. Ça fait partie du dispositif.






