Encore en début de mandat à la direction du Centre Dramatique National de Tours, Bérangère Vantusso y présente sa nouvelle création de metteuse en scène jusqu’au 15 novembre, avant un départ en tournée. Avec Faire le beau, écrite par Nicolas Doutey, et jouée par l’équipe du Jeune Théâtre en Région Centre – intégrée à l’Olympia – elle invite le public à se questionner sur un acte quotidien lourd de sens : s’habiller.
La pièce commence par une scène que tout le monde a pu vivre avant une soirée, un entretien d’embauche ou le repas de Noël de son entreprise. Comment choisir la bonne tenue, pour être dans le bon tempo. Décontractée, mais pas trop. Classe, mais pas trop. Au risque de dénoter dans l’assistance. Amusante à regarder, la situation fait écho à une réalité : chaque année on passe de longues heures à réfléchir aux habits à mettre. Cela prend de l’énergie et dépasse la fonction primaire du vêtement qui est de nous protéger du froid ou de préserver notre intimité.
Alors que l’actualité nationale se concentre sur les frasques des géants de la fast fashion (avec toutes les conséquences environnementales qui en découlent), la réflexion suggérée par Faire le beau est salutaire. En se basant sur l’histoire de la mode depuis le Moyen-Âge, et sur des entretiens avec des élèves de collèges, le texte de Nicolas Doutey insuffle une réflexion, une prise de distance sur notre rapport avec la mode, la tendance, le tissu. Bref, les codes de l’habit.
En 1h20, on passe d’une ode au jogging à une chanson loufoque sur le slip. Du corset au gilet jaune. Des tenues de bal de la Révolution, au costume de Superman. Le travail de costumes est formidable. Accompagnée par une guitariste, les 5 actrices et acteurs ne cessent de changer de look sous nos yeux, dans une très belle chorégraphie. Et à plusieurs reprises, on pose le regard sur ce tas de fringues en plein milieu de la scène, celui que l’on contemple aussi parfois à la maison avec un air mi-amusé, mi-désespéré.
Ce que raconte Faire le beau, c’est l’histoire du vêtement et le vêtement qui fait l’histoire. Caustique, grinçante, parfois absurde, la pièce est aussi mélodramatique, pour atteindre un final carnavalesque. On se délecte du décor mouvant, symbolisant la cabine d’essayage, le dressing mal rangé ou la friperie. Evidemment il est question de politique, de féminisme, de notre rapport au corps, à la couleur, aux formes, à la société.
Il est bon de se laisser embarquer dans cette danse du style, ou plutôt des styles. Car Faire le beau on le voit avant tout comme un appel à respecter les singularités, les identités. A ne pas juger au premier abord, à prendre le temps de voir l’esprit derrière le tissu. C’est ce qui se joue en sous-texte et dans les lumières clinquantes de la pièce pour laquelle des places restent disponibles. Réservations sur www.cdntours.fr.
Crédit photos : Ivan Boccara.
