Covid-19 en Touraine : analyse de la situation à l’heure du couvre-feu

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Ce week-end, l’Indre-et-Loire rejoint la liste des départements en alerte Covid maximale ce qui va obliger tout le monde à rester à la maison de 21h à 6h pendant au moins 6 semaines, avec l’objectif de freiner l’épidémie de coronavirus. La mesure vaut pour tout le département, de Tours à Bossay-sur-Claise, de Saint-Pierre-des-Corps à Hommes. Un dispositif parfois contesté mais défendu par le CHU de Tours qui craint d’être submergé par les malades.

Parmi les symptômes de la Covid-19 il y a la fièvre, la toux, la perte du goût et de l’odorat ou des difficultés à respirer. L’apparition de cette maladie entraîne également la multiplication de comportements parfois difficiles à cerner… « Je m’inquiète car je vois – sur les réseaux sociaux – des personnes qui se font tester pour être tranquilles et aller manger chez des copains. Le test négatif devient un sésame et cette mode me scandalise. Nous devons éviter les réunions inutiles. Se réunir à 10 pour un repas ce n’est pas possible sinon l’hôpital va couler. » L’homme qui parle c’est le chef des maladies infectieuses du CHU de Tours, le Professeur Louis Bernard. A chaque fois qu’il prend la parole il a cette petite phrase qu’il espère suffisamment forte pour provoquer une prise de conscience dans la population. Il ne menace pas, il joue sur l’émotion. Le côté paternel teinte d’agacement sincère plutôt que la sévérité automatique.

« Restez sage » implore le médecin quand on lui demande une analyse de la situation aujourd’hui en Indre-et-Loire. « L’épidémie galope. A Bretonneau hier c’était la première fois que je voyais plus de monde dans la file d’attente réservée aux personnes avec des symptômes que dans la queue dédiée aux personnes asymptomatiques. » Le nombre de cas progresse mais l’hôpital ne semble pas débordé : 27 personnes avec diagnostic Covid ce vendredi en médecine conventionnelle, 11 autres en réanimation. Sur les réseaux sociaux toujours, les commentaires qui minimisent la situation en ne mettant en avant que les chiffres qui les arrangent sont légion.

Des données parfois contradictoires mais à prendre dans leur ensemble

Y’a-t-il donc deux poids deux mesures ? C’est vrai qu’on est très loin des 64 patients sous respirateur artificiel du 11 avril dernier. On était alors en confinement depuis presque 4 semaines…  Après la courbe n’a quasiment fait que descendre, elle est actuellement remontée à son niveau de fin mai.

A écouter Louis Bernard et les autres représentants du 1er hôpital de la région, plusieurs facteurs expliquent que l’afflux de cas de l’automne ne soit pas automatiquement jumelé avec une explosion des admissions, par exemple les personnes les plus à risques ont été contaminées dès la première vague et puis les recherches de traitement permettent de mieux soigner, donc d’éviter des placements en soins intensifs. Néanmoins, si la courbe des infections ne se calme pas, les médecins redoutent l’embolie et le retour de pics comme en début d’année : « La situation peut basculer très rapidement » prévient la secrétaire générale du CHU Pauline Bernard. L’infectiologue complète en faisant remarquer que les cas en réa ont bondi d’un coup dans le Nord. Plus près de nous, à Orléans, l’hôpital commence à déprogrammer des opérations après une flambée de cas graves. Il faut bien regarder toutes les courbes, tous les tableurs pour évaluer la situation.

« Si le nombre de malades triple en réanimation on sera submergés. La pente sera proportionnelle au respect de la distanciation » dit encore Louis Bernard. Le CHU fait déjà face à des difficultés de recrutement et tient via l’intérim et les étudiants. Sauf que le recours aux infirmiers en formation va être limité car ils ont déjà été très sollicités au cours de la première vague. Au maximum, 90 lits de réa peuvent être disponibles dont 45 dédiés au coronavirus. A cela s’ajoute une fatigue chronique des personnels, pas encore requinqués de la première vague.

L’heure du compromis global plutôt que la défiance par principe

Il est vrai qu’on peut critiquer la gestion épidémique de l’Etat ou des préfectures. Que des décisions paraissent, au mieux, étonnantes, au pire, ubuesques. Le couvre-feu généralisé y compris à Sepmes, Noizay ou Château-la-Vallière a du mal à passer… Mais quand certains critiquent la généralisation des restrictions, en face il y en a toujours d’autres qui dénoncent un manque d’unité dans les décisions (du genre « ah bah c’est bon, on peut emmener le virus dans le département d’à côté qui n’est pas en alerte maximale »). Impossible de mettre tout le monde d’accord et les débats sur les réseaux sociaux ou à la télé tournent vite au vinaigre sur fond de stérilité.

La clé réside en une formule : ces mesures ne sont pas pensées pour traquer les voisins d’un petit village qui se réuniraient pour une raclette jusqu’à 23h mais pour les inciter à ne pas l’organiser. Tout le sens du « Restez sage » de Louis Bernard, qui signifie la même chose que le « Si l’épidémie s’accélère encore on prendra des mesures plus strictes » du 1er ministre Jean Castex en conférence de presse. C’est juste la sémantique qui est différente. Quand l’un appelle au civisme, l’autre menace avec le bâton. Dans quel cas on convainc le plus de monde ? Difficile de répondre… Cela dit, comme il apparait maintenant certain qu’on ne pourra pas reprendre nos bonnes habitudes sans aplatissement durable des courbes sanitaires, l’heure est peut-être plus au compromis global qu’à la défiance de principe.

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