Le Petit Patrimoine : la belle histoire d’un restau de Tours qui fête ses 30 ans

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Entre les difficultés inhérentes au métier ou les tendances qui évoluent à la vitesse de la lumière, rares sont les restaurants qui conservent le même propriétaire, le même nom ou le même concept pendant plusieurs décennies. Souvent les enseignes valsent aussi vite que les chefs. Mais d’autres s’accrochent comme le Helder en son temps en haut de la Rue Nationale à Tours, Le Douro, le Mastroquet, le Zafferano (néanmoins tout récemment vendu) mais aussi Le Petit Patrimoine, Rue Colbert.

Est-ce que Franck Garand est un dinosaure de la restauration tourangelle ? On peut dire que oui, et il l’assume. Ce quinquagénaire a uniquement exercé dans le secteur faisant un passage en Haute-Savoie au début de sa carrière avant de prendre place au Cœur Navré Rue Colbert (devenu L’Affiné aujourd’hui). En 1995, fini le mouvement : l’homme se pose au Petit Patrimoine, en s’associant avec Romain Soufflot qui avait ouvert l’adresse en 1991 (et qui est désormais retraité). « Je suis venu le soutenir parce qu’à la base il n’était pas du métier » raconte le chef d’entreprise fier de montrer une photo où ils posent tous les deux (une époque où sa chevelure était plus garnie, et moins grisonnante).

Son métier, Franck Garand en parle avec passion et sans filtre. « Le Petit Pat’ » c’est l’adresse qui a subsisté à tous les tangages, « le cheval de course » quand les autres établissements qu’il a lancés ont fini par stopper le service (dont un qui proposait des paëllas, « parce que personne n’en faisait à Tours ». La salle est sobre, dans son jus pourraient dire certains. Quelques photos en noir et blanc sur les murs, des tables aux sets personnalisés dépourvues d’autres fioritures: « J’ai tenté les nappes vichy mais j’ai fini par arrêter, j’en avais marre de faire les lessives. » En fait on est dans l’ambiance bouchon et c’est complètement assumé.

Une nouvelle cheffe depuis peu

« On cherche à faire de la restauration traditionnelle avec le plus de local possible » insiste Franck Garand en déposant sur la table sa fameuse tourte tourangelle remplie de rillons et de sainte-maure-de-touraine : « Je n’ai jamais vu personne en laisser » jure-t-il. Si la carte change régulièrement et que la jeune cheffe Cécilia Schipper vient de reprendre la tête des cuisines après un départ en retraite, certains immuables restent :

« On fait toujours nos rillons, nos rillettes et nos terrines maison. Nos pommes de terre viennent du Loir-et-Cher. Le congélateur c’est juste pour les glaces. Avant on affinait nos fromages dans la cave, dont vous voyez encore l’extracteur ici au pied de la façade. On proposait 3 affinages différents et ça marquait les clients, mais ce n’est plus possible à cause des normes sanitaires d’aujourd’hui. On continue tout de même de proposer plateau de fromages avec des fournisseurs tourangeaux. L’aseptisé, on ne peut pas. Ce qu’on veut c’est être pros sans se la raconter. »

Ainsi, le menu du midi démarre à 14€50, c’est 27€ pour le repas complet au dîner. « La restauration, c’est un métier à but lucratif quand on peut » résume Franck Garand, défendant une politique de prix doux avec des assiettes généreuses. En cuisine la cheffe est épaulée par deux apprentis auxquels s’ajoutent un plongeur et deux personnes en salle dont le fils du patron, un jeune de 23 ans qui veut poursuivre l’aventure et qui s’est mis au service depuis 4 ans après les études adéquates, mention sommellerie :

« Ce n’était pas prévu mais un jour j’avais besoin, je lui ai dit ‘si tu veux venir c’est maintenant’. Il l’a fait et il est super à l’aise dans son élément. »

« On fait beaucoup d’heures mais on n’est pas là pour se plaindre sinon on ferait autre chose » lance son père peu habitué de la sieste en dépit de réveils vers 6h30 et de couchages aux environs de minuit. Ces derniers temps, Le Petit Patrimoine est passé par toutes les péripéties : à la fermeture imposée après un incendie en juin 2019 a succédé le 1er confinement anti-Covid avec 2 mois et demi sans clients, puis sa version 2.0 étendue sur plus de 6 mois. « En 28 ans on n’avait eu aucune tuile puis ça s’est enchaîné. On est encore un peu dans les travaux et on se bat toujours avec mais on tient, en particulier grâce aux fonds propres et aux aides de l’Etat pour la crise sanitaire. » Ainsi, la clientèle commence à revenir doucement au cœur d’une saison « bizarre » à la météo incertaine et aux événements sportifs rapprochés qui vident les restos au profit des terrasses.

« La Rue Colbert, un des meilleurs endroits pour déjeuner ou dîner »

L’extérieur, Franck Garand n’y a installé que quelques tables. Alors que la mairie envisage une piétonnisation plus récurrente de la Rue Colbert après concertation, le commerçant n’est pas demandeur afin d’éviter « qu’elle se transforme en Place Plumereau bis ». « Ici c’est une rue tranquille avec beaucoup de professionnels. Un des meilleurs endroits pour déjeuner ou dîner, il n’y a pas d’attrape-touristes, on trouve de bons rapports qualité-prix et les adresses bougent peu. »

Pas de doute, le boss du Petit Pat’ est attaché aux traditions. S’il regarde parfois avec admiration les concours culinaires à la télévision, Franck Garand reste sceptique face à leur impact sur les cartes de ses confrères : « On ne va pas émincer des rillons et appeler ça un carpaccio de rillons. Et on ne fait pas de roman : un poireau-vinaigrette avec œuf mimosas ce n’est pas une entrée qu’on appellera ‘retour du potager en automne couvée sous les poules’. Quand on lit un menu il faut que l’on sache ce qu’on va manger. » Ce qui n’empêche pas de chercher comment évoluer : le matériel a récemment été modernisé et les préparations de plats se font désormais minute même si ça rallonge un poil le temps de service. « Ce que je veux c’est que le restaurant reste un plaisir pour tout le monde. J’adore voir les gens qui n’ont pas beaucoup de moyens et qui viennent chez nous une fois par mois pour se faire plaisir. A nous de ne pas les décevoir » conclut l’homme.

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