Le Plessis-théâtre de la discorde

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Dimanche dernier le Plessis-théâtre accueillait les Ilots Electroniques, l’occasion pour la Compagnie Cano-Lopez de sortir de son silence et de commencer sa défense. Les spectateurs des Ilots ont ainsi pu découvrir en arrivant sur le site deux grandes banderoles de soutien au Plessis-théâtre et ont été invités à signer une pétition similaire (également disponible en ligne). Une initiative que la mairie de Tours n’a guère apprécié à en croire l’agacement perceptible de Serge Babary lors des questions sur ce sujet, pendant la conférence de presse que la majorité a donné mardi dernier : « J’en ai marre de ces troupes qui n’ont qu’une idée, que la mairie passe à la caisse ».

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Le conflit était latent depuis quelques mois. Déjà en novembre 2014, lors de la Louis Live Party organisée dans l’ancien château de Louis XI, José Manuel Cano-Lopez, directeur du Plessis-théâtre s’était fendu d’un discours qui ne laissait que peu de doutes sur ses relations avec la mairie de Tours, propriétaire des lieux.

La fin du Plessis-Théâtre programmée au 1er janvier 2016

Depuis 1998, dans le cadre d’une convention triennale puis annuelle depuis 2012, la mairie de Tours met à disposition de la Compagnie Cano-Lopez, le château du Plessis dont elle est propriétaire. Il y a quelques semaines, la mairie a signifié son souhait de ne pas renouveler cette convention pour 2016. Alors que des rumeurs de nouveaux projets sur ce lieu se font échos en ville, pour Christine Beuzelin, « la priorité est de faire des travaux dans ce lieu qui tombe en ruines et qui n’est pas adapté pour accueillir du public ».

Un choix que José Manuel Cano-Lopez n’accepte pas et après plusieurs semaines de silence, le directeur du Plessis-théâtre est désormais prêt à se défendre publiquement. En cause, la fin de la convention donc, mais aussi la baisse importante des subventions que sa compagnie subit. Interrogée également sur la baisse des subventions, l’adjointe à la culture de la ville de Tours pointe « les 70 000 euros attribués cette année encore à la compagnie Cano-Lopez, soit 70% des subventions théâtre que l’on verse » note-t-elle. Une baisse que Christine Beuzelin justifie par « la volonté de mieux redistribuer aux autres plus petites compagnies ».

70 000 euros mais une baisse d’environ 35 % sur une année. Une coupe franche dont la compagnie pourrait avoir du mal à s’en remettre, d’autant plus qu’elle fait suite à des baisses précédentes de la part de toutes les collectivités. Depuis 2008, la Compagnie Cano-Lopez a en effet perdu 250 000 euros de subventions publiques, de la région, la Drac, le département et la mairie. Des baisses non sans conséquences sur cette structure professionnelle depuis 1986. De sept employés permanents en 2008, aujourd’hui la compagnie n’emploie plus que 2 emplois 3/4 en équivalents temps pleins, ainsi qu’une trentaine d’artistes indépendants ou intermittents contre une quarantaine en 2008.

On ne va pas se mentir, José Manuel Cano-Lopez n’a pas que des admirateurs dans l’agglomération tourangelle et certains de ses détracteurs se délectent déjà des soucis du charismatique directeur du Plessis-théâtre. Des détracteurs qui pour certains remettent en cause, l’importance des subventions qu’a bénéficié la Compagnie Cano Lopez depuis des années.

Le Plessis-Théâtre, c’est quoi ?

Mais donc une seule compagnie de théâtre touche plusieurs dizaines de milliers d’euros ? Pas si simple car pour comprendre l’enjeu du débat, il convient avant tout de s’intéresser à l’ensemble des activités du Plessis-théâtre. En effet, plus qu’une compagnie théâtrale, la Compagnie Cano Lopez a depuis ses origines promu une idée d’ouverture pluridisciplinaire. Ainsi le Plessis-théâtre c’est « 28 équipes en résidence en 2015 » nous dit José Cano Lopez et parmi elles, neuf artistes associés à l’année, qu’ils soient musiciens comme Boys in Lilies, Madera Em ou Beat Matazz, peintre-plasticien comme Nep, photographe comme Guy Delahaye ou des compagnies théâtrales comme la Compagnie Rag Bag, la Compagnie 21. Autant d’artistes qui bénéficient d’une résidence à l’année, d’aide sur leurs créations, sur la mise au point de leurs projets… Le Plessis-théâtre ne se résume pas ainsi aux créations de la Compagnie Cano Lopez mais ressemble plutôt à un lieu où des passerelles entre milieux artistiques sont nombreuses. Une volonté née de celle d’être dans une démarche d’éducation populaire et d’entraide artistique.

Lors de notre rencontre, l’actuel directeur du Plessis-théâtre évoquait ainsi « la recherche de l’échange permanent vers les publics », un échange symbolisé ce dimanche dernier avec l’accueil des Ilots et de ses 2800 spectateurs au long de l’après-midi. Comme preuve de cette ouverture aux autres et de cette démarche de partage de l’outil de travail, José Manuel Cano Lopez pointe également que les créations de sa compagnie ne représentent que 10 % des 80 manifestations organisées à l’année.

IMG_4872Les Ilots Electroniques au Plessis-théâtre, dimanche 10 mai 2015

Autre facette méconnue du Plessis-théâtre : les formations effectuées. Entre ateliers hebdomadaires pour adultes handicapés, pour jeunes en réinsertion, ateliers artistiques avec les scolaires que ce soit en collèges ou en lycées, des formations auprès d’infirmières, auprès du département de Carrières sociales à l’IUT de Tours, ou encore des cours à l’université… « 80 % des formations, sont tenues au sein du Plessis » précise José Cano Lopez en évoquant un total de « 1000 heures de formation régulière en 2015 qui touchent plus de 900 stagiaires. »

Plus loin encore que le sort de la compagnie en elle-même, la fermeture du Plessis-théâtre pose ainsi des questions sur l’avenir d’un système dont bénéficiait un large panel d’acteurs culturels tourangeaux. « Nous allons voir comment accompagner les artistes. Il y a par exemple d’autres lieux comme le 37e Parallèle qui a des salles et des studios pouvant servir à des résidences » nous a répondu Christine Beuzelin quand nous l’avons interrogé sur ce sujet. Une chose est sûre c’est que José Manuel Cano Lopez n’entend pas se faire déloger en silence et promet de faire du bruit, cela commencera par une conférence de presse qu’il tiendra mercredi 20 mai.

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