Opération coup de poing contre les féminicides

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Dans la nuit du 8 au 9 septembre 2019, des slogans chocs sont apparus dans les rues tourangelles. “Plus écoutées mortes que vivantes”, « Dans 53 féminicides, c’est Noël » ou “Le coeur bat, pas les poings” sont les différentes phrases que les habitants de Tours ont pu découvrir sur les murs de la ville au petit matin.

À l’initiative de cette opération, la page Instagram “on arrête toutes Tours”, créée en Juin dernier, après que l’activiste féministe Irenenevrose, initiatrice de la page “on arrête toutes” a appelé ses quelque 40.000 abonnés à créer des antennes locales.

À Tours, c’est Emma, du haut de ses 22 ans, qui s’occupe de la page.

Une organisation millimétrée. 

C’est le 2 septembre, qu’Emma a décidé de lancer l’opération collage dans les rues de Tours. Via sa page “on arrête toutes Tours”, elle organise un appel au volontariat pour un  collage qui aura lieu le dimanche suivant. “J’ai vu qu’il y avait des opérations de ce genre pour sensibiliser sur les féminicides, tous les jours, dans Paris. Je me suis dit qu’il fallait faire quelque chose au niveau local.”  Surtout que Tours n’est pas épargnée par le fléau. Le 31 Mars 2019, Stéphanie est morte, égorgée par son ex petit ami, alors qu’elle avait plusieurs fois donné l’alerte.

Sur la page Instagram, les réponses ne se font pas attendre, en l’espace d’une semaine, Emma réunit une vingtaine de personnes, et avec l’aide de ses nouvelles camarades, elle trouve une salle pour préparer les slogans et définit la date du 9 septembre comme journée d’action.

Une préparation minutieuse.

Le dimanche 9 septembre, dès 10h du matin, le petit groupe se rassemble. Parmi elles, on retrouve tous les profils, tous les âges, et même une jeune fille de 14 ans qui maîtrise le sujet à la perfection. Deux hommes font également partie du groupe. “Ça peut être difficile à croire mais certains hommes sont féministes” nous dit Emma.

 C’est le début d’une très longue journée qui peut commencer. Chaque participant amène peintures, pinceaux ou encore nourritures. Les slogans ont déjà été imaginés en amont par le groupe “les phrases, ce sont soit des déformations de titres d’articles de journaux, soit des phrases que l’on a vue dans les collages parisiens ou toulousains.”

Au rythme d’une lettre peinte par feuille A4, les slogans prennent peu à peu forme au fil de la journée. Chacun a sa technique pour peindre, du pinceau au doigt. Ces gens, qui ne se connaissaient pas avant ce jour, travaillent formidablement bien ensemble, chacun sait ce qu’il doit faire. Les conversations tournent majoritairement autour des féminicides, Emma avouera même avoir eu du mal à rédiger entièrement la liste des 103 femmes et de leurs âges lorsqu’elles ont été tués par leurs conjoints ou ex-conjoint depuis le début de l’année. Il est 19H, les slogans sont prêts, la peinture est sèche, il est temps de partir.

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Opération collage

C’est un relais qui s’effectue au moment de sortir dans les rues de Tours, certains préparateurs ne pourront pas aller sur le terrain (obligations personnelles, pas l’âge requis…) Ce sont donc de nouveaux participants qui viennent remplir les rangs de nos militantes. Après une bonne heure de préparation de colle, Emma crée trois groupes différents avec des murs bien précis, repérés en amont,  pour savoir où coller les feuilles.

A 21H, alors que la nuit tombe dans les rues de Tours, l’opération commence.

Chaque collage est l’occasion d’une chorégraphie préalablement préparée : deux personnes disposent la colle, une personne distribue les feuilles à placarder et la quatrième place les feuilles sur la colle. Il faudra rarement plus de cinq minutes pour mettre en place les slogans. Efficace. 

Efficace, le résultat l’est aussi, à la vue de chaque message, le malaise est palpable, le choc est présent.   “Coller des affiches à la vue de tout le monde, c’est le moyen le plus percutant de sensibiliser la population, lorsqu’un enfant voit cela, il va directement demander à ses parents la signification… cela pousse à l’éducation et tout passe par l’éducation.”

Et lorsque l’on voit certaines réactions, on se dit qu’un long chemin reste encore à parcourir. Au moment d’installer l’affiche “31.03.19. Stéphanie égorgée par son ex à Joué-Lès-Tours”, le petit groupe de militantes est embêtée par des curieux qui n’hésitent pas à proférer railleries et commentaires déplacés. 

Malgré cela, la soirée s’est bien déroulée dans l’ensemble, presque toutes les affiches ont été collées sans accroc. Il est 23h30, les différents groupes éparpillés dans la ville se rejoignent avec le sentiment du devoir accompli. “On ressort de cette journée avec plein d’ondes positives, on se sent plus puissantes et un peu plus libres”.

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Et maintenant ?

On arrête toutes Tours ne compte pas s’arrêter là. “Si rien ne bouge, on partira sur des collages plus grands et encore plus percutants. On a vraiment besoin d’éducation, de toute la population, des enfants aux forces de l’ordre.”

Au-delà des collages à venir, un grand événement rassemblera  les pages “on arrête toutes” de la France entière : une grève générale va être organisée le 8 mars 2020, journée internationale du droit des femmes.

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