Météo France fait la pluie et le beau temps

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Observer, prévoir et étudier. Voici les trois missions principales de Météo France. Devant leurs écrans, les prévisionnistes analysent et décryptent les mouvements des nuages, la force du vent et la violence de la pluie. Leur principale mission : nous tenir au courant. Reportage au centre météorologique de Parçay-Meslay.  

Six écrans d’ordinateurs alignés. Six cartes différentes, clairsemées de couleurs et de petits points. « Ici, on voit les nuages en altitude. Et là, ceux qui sont plus bas dans l’atmosphère. » Pierre Bonnin est le directeur adjoint du centre météorologique de Touraine. En tout, ils sont une petite dizaine, dont six prévisionnistes, à travailler dans ce centre de Parçay-Meslay. « Vous avez un champ sur votre droite et vous voyez cette route avec de l’herbe qui pousse au milieu ? Vous continuez et c’est par là, au bout de ce chemin qui a l’air de ne mener nulle part. » Et effectivement, perdu au milieu du blé, juste à côté de l’aéroport militaire, le centre météorologique de Touraine. Et il n’est pas là par hasard.

Juste derrière le bâtiment, un petit lopin de gazon. De loin, on pourrait presque commencer à imaginer un joli jardin potager. Mais à la place des carottes et des tomates, ce sont en fait une dizaine d’appareils de mesure météorologique qui sont plantés là. « Nous avons des normes ultra-précises. Ce sont les mêmes dans le monde entier, pour que le relevé de température soit fait dans les mêmes conditions, que ce soit à Los Angeles ou à Tours ». Les instruments doivent être 1,5 mètres au-dessus du sol, sur de l’herbe, dans des abris en plastique blancs et aérés. Aujourd’hui tout est numérique mais il y a encore quelques années, les instruments étaient protégés dans une armoire en bois peinte en blanc. L’objectif principal : faire que l’environnement des instruments de mesures soit le plus neutre possible. Ensuite, toutes les données collectées sont stockées par Météo France et l’OMM, l’Organisation Météorologique Mondiale. Cet organe de l’ONU peut ainsi faire des comparaisons et des statistiques pour réaliser des prévisions au niveau global.

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Vulgariser les relevés

Les appareils plantés dans le petit lopin de terre sont tous plus ingénieux et sophistiqués les uns que les autres. Le pluviomètre fonctionne grâce à un petit réservoir qui se vide tous les 0,2 millimètres de pluie en allant taper sur un capteur. Le taux d’ensoleillement est mesuré grâce à de la fibre optique captant les rayons du soleil (s’il y en a) toutes les 36 secondes, soit 1/100e d’heure. Le nombre de centimètres de neige est capté par un laser pointé sur une dalle de béton. L’humidité ou le verglas grâce à un flash braqué sur une plaque de goudron. La vitesse et la force du vent ? Par un système d’ultrason. Etc, etc, etc…  Pierre Bonnin est intarissable. Et on pourrait l’écouter parler pendant des heures.

Ces deux appareils servent à mesurer le taux d’ensoleillement.
Un pluviomètre.

D’ailleurs, de nombreux groupes de tous âges viennent visiter les installations et écouter ses explications. « Ça fait parti de nos missions de service public d’informer les gens et de prendre le temps avec les médias. Ce sont des choses que nous avons appris au fur et à mesure. Par exemple, en 1999, avant la tempête qui fera 92 morts en France, nous avions alerté la Préfecture. Mais la population n’avait pas été assez tenue au courant. Alors nous avons imaginé de système d’alerte jaune, orange et rouge. » En fait, ce système existait déjà en Outre-mer. Mais Météo France l’a adapté au territoire métropolitain, avec toute sa richesse et sa diversité : vagues-submersion, orages, neige-verglas, grand froid, canicule, avalanche, vent violent, inondation et pluie. Autant d’alertes que de géographie. Et à chaque alerte son comportement adéquat. « Maintenant, c’est rentré dans les usages, sauf pour ceux qui se font attraper par une vague en allant prendre une photo, glisse Pierre Bonnin. Les médias sont de bons relais donc nous travaillons souvent avec eux. Évidemment, la préfecture sera toujours prioritaire aux médias, mais quand on a le temps, on le fait avec plaisir. » Le centre ne recommande rien : il observe et indique. « La tempête Miguel n’était pas plus forte qu’une tempête hivernale classique. Mais là, avec tous les arbres en feuilles, la prise au vent était plus importante que d’habitude. Il fallait donc s’attendre à des chutes d’arbres et de branches. Et c’est ce qu’il s’est passé. »

Coup de tonnerre sur les finances de Météo France

Le centre météorologique de Touraine est un organisme public, mais ce n’est pas pour autant que c’est un service gratuit. Leurs plus gros clients : la SNCF, mais aussi des autoroutes et les métropoles. « Il faut qu’ils sachent quand sortir le chasse neige ou la saleuse », explique Pierre Bonnin dans un sourire. Parmi leurs fidèles, on trouve aussi TF1. La fameuse Évelyne Dhéliat, présentatrice météo sur la chaîne n°1, peut ainsi avoir jusqu’à deux explications complètes par jour faites par les agents de Météo France. « Après, ce sont eux qui font leurs animations télé, pour que ça colle à leur charte graphique. »

Malgré tous ces clients, près de 50 % du budget de Météo France vient de l’État. Et comme partout, pour eux aussi, c’est serrage de ceinture. « Le centre de Touraine est amené à disparaître dans les prochaines années », constate amèrement Pierre Bonnin. Avec les réductions d’effectif et les progrès techniques, beaucoup de postes vont être délocalisés à Rennes d’ici deux ans. Aujourd’hui, le centre de Parçay-Meslay dépend de celui de St Mandé, en Ile-de-France. Mais dans six mois, ce qu’il restera de ce centre au milieu de nulle part sera géré depuis la ville bretonne. « Avec la technologie, ce n’est pas grave, on peut faire ce qu’on veut d’où on veut. J’espère juste que Météo France arrivera à recaser tout le monde… » Et que personne ne perdra son poste. Aujourd’hui déjà, les départs à la retraite ne sont plus remplacés. Il y avait 3 700 postes en 2012. Il n’en reste plus que 2 900 en 2019.

100 000 ordinateurs domestiques pour prévoir la pluie

Un tiers des personnes travaillant à Météo France sont basés à Toulouse, ville emblématique de l’aéronautique français, mais aussi lieu d’accueil du plus gros centre météorologique français. Là-bas, un ordinateur aussi puissant que 100 000 ordinateurs domestiques. Toutes les trois heures, il peut faire une série de prévision en prenant en compte toutes les observations relevées sur le terrain et les images satellites. Ce super calculateur utilise des modèles mathématiques créés par Météo France. Pour leurs calculs, ils ont divisé la couche d’ozone en cubes plus ou moins grands en fonction de la volonté de précision des relevés. Ensuite, en fonction de l’évolution de la situation dans ces cubes d’ozone, la machine peut aller jusqu’à deux jours de prévision avec une précision de 75 à 80 %. 90 % pour 24 heures. « Au-delà, on doit changer de schéma et de largeur de cube pour pouvoir avoir des tendances. D’ailleurs, on ne parle plus de prévisions mais de tendances. »

Par contre, plus besoin de prévision pour parler de réchauffement climatique. « Je pourrais vous en parler, mais je suppose que vous le savez déjà : les courbes de températures sont anormalement en hausse depuis une dizaine d’années. » Au mur, des graphiques à n’en plus finir. Les précipitations moyennes ne suivent aucune logique en fonction des années. La courbe de température, elle, est scandaleusement en hausse, de manière régulière. Et Météo France constate, impuissant… « On ne peut pas arrêter la météo… Enfin, pas encore ! »

Un graphique affiché dans le couloir du centre météorologique de Parçay-Meslay. Les années 2010 sont les plus chaudes jamais enregistrées jusque là.
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