Les malaises des pompiers en Indre-et-Loire

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Si vous passez par le Boulevard Wagner à Tours, difficile de les rater : de grandes banderoles sur les grilles de la caserne Chassagne des pompiers, mais aussi au balcon dans les étages. Depuis le début de l’été, les soldats du feu du département sont appelés à la grève dans le cadre d’un large mouvement national qui devait s’arrêter fin août, mais qui a finalement été reconduit. Une manifestation nationale se profile d’ailleurs pour le mois d’octobre, le 15.

Anthony Chauveau est le responsable de l’antenne du syndicat CFTC, principal syndicat de pompiers en Indre-et-Loire. Dans son dos, on peut lire un slogan en référence au mouvement qui dure depuis plus de deux mois maintenant. Des camions avaient également été peinturlurés pendant quelques temps cet été avant que la direction du SDIS37 ne réclame leur nettoyage. Peu visible, la grève semble également assez peu suivie selon les explications du représentant du personnel. Il n’empêche, à l’écoute, le malaise est profond dans la profession : « ça craque de partout et dans de très nombreux départements. » Ici, on se souvient par exemple de mouvements d’humeur au moment de la Sainte-Barbe – la fête des pompiers – avec manifestation à l’entrée d’une cérémonie protocolaire organisée au Château de Villandry. Pas très loin d’ici, les difficultés font également trembler les services du Loir-et-Cher ou des Deux-Sèvres.

30 à 40 postes en plus demandés en Indre-et-Loire

Qu’est-ce qui coince ? Comme pour beaucoup de professions qui se mobilisent, Anthony Chauveau fait référence au manque de moyens humains et financiers : « On nous demande de faire plus avec moins suite à la baisse des dotations de l’État envers les collectivités locales. » Rappelons que dans chaque département, les pompiers sont financés par le Conseil Départemental et les EPCI.

« On n’a pas les marges financières à la hauteur des enjeux de la sécurité civile du XXIe siècle » relève encore le syndicaliste de SDIS37 en citant la baisse du nombre de volontaires et la hausse des appels au 18 ou au 112 :

« Il arrive souvent que les pompiers de Loches soient appelés à Descartes, soit 30 à 35km. Avec une ambulance c’est une demi-heure de route, 40 à 45 minutes avec un fourgon échelle pour un feu. La question qui se pose est donc de savoir si les citoyens sont prêts à accepter un service qui se dégrade… »

Le message est adressé à l’État, pas au Département : « C’est un problème national et pour l’instant la seule réponse que nous avons eu de Christophe Castaner est d’entendre que nos revendications étaient légitimes mais qu’il ne pouvait pas décider seul. Il y a un ping pong entre l’État et les départements, ce qui peut durer très longtemps » énumère Anthony Chauveau qui n’attendait pas grand chose du congrès national des pompiers organisé ce week-end à Vannes, trois ans après une réunion à Tours en présence du président d’alors François Hollande qui n’avait pas non plus débouché sur des mesures marquantes.

Manifestation aux côtés des urgentistes

A l’échelle locale, selon la CFTC, le SDIS aurait besoin de 30 à 40 effectifs supplémentaire, soit 10% de masse salariale en plus. « Un poste c’est 40 000€ annuels au salaire de base » précise Anthony Chauveau. En clair, avec l’avancement, on peut estime qu’il faudrait une rallonge annuelle de 2 millions d’€ au budget du SDIS37 pour combler les manques dans les plannings. Sans compter les investissements matériels :

« On a une partie de nos camions citerne pour les feux de forêt à renouveler, des moyens aériens et des fourgons pompe-tonne. Le SDIS doit enfin acheter 4 échelles neuves à 500-600 000€ dans les 5 prochaines années. »

Ce qui préoccupe encore Anthony Chauveau c’est la masse de missions exigées des pompiers, parfois sans urgence vitale : « Combien de fois on nous a appelé alors qu’il y avait à côté le compagnon ou la compagne qui pouvait emmener la personne blessée aux urgences ! Alors on nous répond ‘avec vous ça va plus vite’ mais c’est faux car nous aussi on attend l’hôpital. » Il y a quelques temps les soldats du feu tourangeaux avaient d’ailleurs déjà pointé ce problème de temps d’attente conséquent au CHU, impactant les délais d’interventions. Solutions suggérée : « développer les maisons médicales qui sont loin d’être exploitées à hauteur de ce qu’elles devraient être et c’est pour ça que les urgences sont engorgées. » C’est d’ailleurs avec les personnels des urgences que les pompiers tourangeaux comptent manifester ce jeudi 26 septembre dès 14h au départ de la Place Jean Jaurès, le service du CHU étant lui aussi touché par une grève depuis des semaines.

Plus d’infos dans cet article d’Info Tours

Comme les pompiers, avec les réquisitions ça se voit peu car le service reste assuré. « Ce qui m’inquiète c’est que ça va être un conflit long, on est incapable de savoir sur quels points on arrivera débloquer la situation » conclut le pompier syndiqué. Car au-delà du manque de moyens, se posent aussi des questions financières, autour de la réforme des retraites, ou de la reconnaissance de la profession : « pompier n’est toujours pas considéré comme un métier à risque alors qu’on pleure une dizaine de morts par an. »


Un degré en plus : la question de la sécurité

Les faits de violences sur les pompiers font régulièrement la Une des médias : dans l’Essonne, les Yvelines… « Nous ça va, mais des fois c’est borderline quand même » relève Anthony Chauveau pour l’Indre-et-Loire. Dans certains secteurs, les pompiers n’interviennent qu’aux côtés des policiers. « Face à cela, la seule réponse de l’Etat est de nous mettre des caméras piéton. Mais vous croyez que ça va dissuader une personne excitée de s’en prendre à nous de lui dire qu’elle est filmée ? »

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