Les 10km de Tours vus par un coureur du dimanche

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Marathon, 10km, 20km… Au total 11 000 personnes ont pris le départ d’une des courses organisées ce week-end à Tours. 40 ans après la première édition des 10 et 20km, l’événement reste populaire réunissant des pros de la discipline et une flopée d’amateurs et amatrices en quête de dépassement. J’en ai fait partie pour la première fois et je vous raconte.

Qu’est-ce qui peut valoir le coup de mettre son réveil avant 7h un dimanche matin ? Un départ en vacances, oui. Un vol en montgolfière, encore oui. L’impatience d’ouvrir ses cadeaux de Noël quand on a 8 ans, à la rigueur. Mais se lever si tôt pour aller courir avec qu’il fait à peine plus de 10° dehors, sérieusement ? Eh bien oui. D’ailleurs c’est drôle, j’ai aussi mal dormi qu’avant de faire un grand voyage. Et j’ai rêvé basket et sueur toute la nuit.

Pourtant la course ce n’est pas mon truc. Depuis le cross du collège je n’ai participé qu’à une seule course : le Trail des Bulles de Vouvray au printemps. J’avais opté pour le parcours de 4km et trouvé le moyen de me perdre.

Depuis, j’ai quand même pratiqué quelques entraînements. Mais il a d’abord fallu s’équiper parce que courir 5km avec des chaussures toutes pourries ça fait très mal à la cheville. Donc à partir du mois de juin j’ai commencé tranquille : une à deux séances par semaine avec des amies runneuses parce que courir seul m’enthousiasme à peu près autant qu’un plat de blettes. Heureusement qu’elles étaient là car j’aurais sans doute abrégé les parcours. Mais non, j’ai persévéré. 5km, puis 6, 7… Même 8 une fois, en combinant l’Île Balzac et la Lac de la Bergeonnerie. J’en bave mais la sensation d’avoir réussi à se dépasser l’emporte à l’arrivée.

Une météo correcte mais pas idéale

Il est temps de s’inscrire et voici mon numéro de dossard : 6403. 6+4+0+3 ça fait 13, mon chiffre fétiche. Dans ma tête je me dis que j’aimerais bien faire moins d’une heure. Soit moins de 6 minutes au kilomètre quand j’en fait plutôt 6’30 voire 6’45 à l’entraînement. L’écart est grand mais tout le monde me dit que le jour J avec l’adrénaline et les encouragements on court plus vite. Je suis obligé de les croire, les souvenirs du cross du collège sont lointains. A l’époque j’avais terminé 31e et j’avais trouvé ça plutôt pas mal. Sur quelle distance ? Aucune idée.

On en revient au dimanche matin à 6h45. Franchement, quelle idée, bis. J’épingle le dossard sur mon maillot, un vieux t-shirt à manches longues qui devrait me protéger du froid. 11-12° dehors sous un ciel gris ce n’est pas détestable comme conditions de courses mais pas idéal non plus. Déjà il ne pleut pas. La météo s’est un peu gourée et c’est une assez bonne nouvelle. L’organisation nous a donné un ticket de bus aller-retour pour rejoindre le départ Place Anatole France mais le 1er bus part à 9h30 quand le début du 10km est à 9h. Autrement dit ça ne sert pas à grand-chose… Il faut donc marcher. On se dit que ça nous échauffera.

« Ne pars pas trop vite »

Arrivé en ville l’ambiance est étonnante. C’est tout silencieux et les seules personnes qu’on croise sont en tenue de course. Parfois en short. Souvent avec un haut annonçant la couleur : Université de Tours, Polioteam de la réa du CHU, SNCF, « 10kms pour Alex »… Il est temps de poser le sac à la consigne, de boire une dernière gorgée d’eau, de quitter la polaire et de rejoindre le sas de départ. Le vent souffle un peu, il fait quand même sacrément frais. Les marathoniennes et marathoniens sont déjà en course depuis une bonne heure. On y pense et puis la foule commence à s’ébranler en suivant les ordres du speaker, sosie vocal d’Elie Semoun (très perturbant !). C’est parti pour 10km via le Pont Napoléon, l’abbaye de Marmoutier, le Pont Mirabeau et le Vieux-Tours.

On m’avait prévenu : « Ne pars pas trop vite ». J’essaye mais je ne sais pas trop ce que ça veut dire. Je n’ai pas de montre connectée ou d’appli qui suit mon cardio en temps réel alors je tente un rythme où je me sens bien. Je suis des gens qui me paraissent de confiance eu égard à leurs foulées. Je me cale dans leur roue, comme on dirait en cyclisme. Je finis par en doubler certains ou me faire distancer par d’autres. Je tâche de rester au milieu de la route et je jette à peine un œil à la Loire quand je la traverse pour la première fois.

L’enfer du Pont Mirabeau

Je vois le panneau du premier kilomètre mais pas les deux suivants. Je ne sais pas où j’en suis dans mon objectif mais je me sens bien. A l’approche de Marmoutier, je surprends une conversation qui me donne une indication : on a déjà fait 3,6km et je suis en dessous des 6 minutes au kilomètre. Donc dans le tempo que je me suis fixé. Mais est-ce que je ne suis pas parti trop vite ? Une spectatrice me salue mais je n’arrive pas à l’identifier. A la sortie de l’abbaye de Marmoutier j’attrape un gobelet d’eau et un bout de sucre, je réussis tant bien que mal à laper quelques gorgées. Je ne sais pas vraiment si ça me fait du bien ou si ça me perturbe dans mon rythme.

On suite la Loire via le parc de Ste Radegonde, le chemin se rétrécit et je commence à peiner, notamment avec un point de côté. Je respire, je repère quelqu’un avec une perruque rose et dans ma tête je me dis que je ne peux pas courir moins vite qu’un gars avec une perruque rose. C’est peut-être stupide comme réflexion mais ça m’a guidé pendant un bon moment. Une fille que j’avais dépassé un temps me repasse devant. Une nana qui a l’habitude de courir revient d’une pause pipi et indique que c’est la première fois qu’elle fait ça. Le mec déguisé en panda est plus encouragé que la moyenne.

Chrono final : 58 minutes et 29 secondes

Il est temps d’attaquer la bretelle d’accès au Pont Mirabeau. Une bonne grosse côte. En croisant les pros prêts à l’aborder au 3e kilomètre je me suis dit que ça serait sans doute une formalité vu leurs grandes enjambées. Et je l’ai entamée en accélérant, juste pour voir. Ça l’a fait… mais quel retour de flamme une fois sur le pont. Là à peine un regard au fleuve. Juste de la souffrance. Encore quelqu’un qui dit bonjour à la sortie : je fais coucou mais je ne la reconnais pas. Je trime. La perruque rose est toujours devant, à distance raisonnable. Je boucle le parcours au mental en zieutant trop souvent ma montre. Cela dit elle me rassure : si je ne craque pas je ferai moins d’une heure.

Je pensais réussir à accélérer dans la dernière ligne droite mais mes jambes refusent. Tant pis. Mais c’est bon c’est fini. Je sais que j’ai réussi. Et c’est un peu la déferlante d’émotions : la fatigue, le corps qui lâche, la joie, l’épanouissement. Je n’aime pas courir, je me suis entraîné en dilettante, je me suis donné un objectif comptable au pifomètre mais ça l’a fait. Pendant une seconde je me suis demandé si je n’allais pas verser une larme. En fait j’ai craché mes poumons. Le texto de l’organisation arrive : 58 minutes et 29 secondes. 1’30’’ de moins que l’objectif. Une fois les esprits repris c’est la fierté qui domine. Se dire peu importe s’il y a 2923 personnes qui ont couru plus vite, le principal c’est de terminer. Et, franchement, j’ai envie de recommencer.

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