[Histloire] Le Camp de Grasse : quand les Américains avaient leurs quartiers en Touraine

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HistLoire, c’est une chronique régulière sur 37° où nous vous proposerons un petit focus sur un pan d’histoire tourangelle. Ce mois-ci, replongeons nous dans la Première Guerre Mondiale en Touraine avec l’histoire du Camp de Grasse

Demain sera célébré le 98e anniversaire de l’armistice de 1918 mettant fin à la Première Guerre Mondiale, l’occasion de revenir sur un pan de l’histoire méconnu de la Grande Guerre en Touraine. En effet, si quand évoque un camp américain, beaucoup pensent immédiatement à celui de l’OTAN à Saint-Benoît La Forêt, en forêt de Chinon qui a marqué les esprits des années 50 jusqu’au milieu des années 60, un autre camp, celui-ci n’était pas le premier camp militaire américain installé en Touraine.

Les Américains en Touraine

Entrés en guerre en avril 1917, les premiers Américains arrivent en Touraine en juillet 1917. Leur présence est notamment restée dans les mémoires au camp d’aviation de Parcay-Meslay qui deviendra la Base Aérienne actuelle et qu’ils ont contribué à développer. La présence américaine n’est pas restée cantonnée au camp d’aviation,. En effet dès janvier 1918, le général Pershing, commandant en chef des Forces expéditionnaires, décide de faire de Tours le quartier général des 640 000 soldats des Services of Supply (SOS) de l’armée américaine. Les SOS étaient essentiellement des services administratifs et techniques, chargés de la logistique et de l’intendance, soutenant les deux millions d’hommes du corps expéditionnaire américain.

Nous gardons en mémoire de cette période, le pont Wilson, nommé en l’honneur du président américain de cette époque ou encore le monument américain près de la bibliothèque. En revanche, dans la mémoire collective, l’installation d’un camp militaire sur la commune de Saint-Pierre-des-Corps est tombé dans l’oubli : Le Camp de Grasse

cite-camp-de-grasse-1-1Cité du Camp de Grasse – (c) Eric Caillé

Le Camp de Grasse

Le Camp de Grasse, nommé ainsi en hommage à l’Amiral de Grasse, était un camp de stationnement pour les soldats. L’installation de ce camp de casernement à Saint Pierre des Corps s’explique par l’importance (déjà) des installations ferroviaires sur la commune qui favorisaient le mouvement des troupes et du matériel. (sur ce lien, un livre entier, en anglais sur le camp en 1918-19). Tours n’avait pas été choisie au hasard comme capitale logistique de l’armée par le commandement américain. Le port de débarquement US étant Saint-Nazaire,= et la ligne de Front étant sur le Nord et l’Est, la position tourangelle se révélait intéressante, d’autant plus avec ses infrastructures de transports.

C’est ainsi pour loger les soldats américains présents dans cette capitale militaire que le camp de Grasse fut créé en avril 1918. Un camp qui était imposant puisque s’étirant sur 1 mile de long (environ 1,6 km), ce qui permit d’héberger jusqu’à plusieurs milliers de soldats simultanément. Aux simples tentes de départ, se substituèrent rapidement de véritables baraquements en dur, des commerces, des quartiers de repos, de sport… Le camp devenant ainsi une ville dans la ville.

Il est resté dans les mémoires de « l’US Army » car pour la première fois dans l’histoire, dans ce camp, on pratiqua le recyclage du matériel militaire et des vêtements en provenance du front au sein des « salvage service », ateliers installés dans le camp de Grasse. A ce titre, des ouvrières et ouvriers tourangeaux furent embauchés pour ce service. On dénombre 5400 femmes et 1500 hommes employés par ces ateliers de recyclage. (source le magazine de la Touraine, n°104, Automne 2007).
Témoignant de l’importance stratégique de ce camp, la fille du président Wilson y est venue chanter pour les soldats.

Du Camp de Grasse à la cité Rimailho

Après la guerre, en avril 1919, l’évacuation du camp de Grasse est décidée. Les derniers soldats partiront pendant l’été 1919. Cette même année, les ateliers ferroviaires de Saint-Pierre reprennent leur activités de réparation et la concession de ces ateliers est confiée à la Compagnie Générale de construction et d’entretien du matériel de chemin de fer (CGCEM) dirigée par Emile Rimailho.

En mai 1920, une grève éclate dans les ateliers et chez les cheminots de Saint-Pierre des Corps. La revendication d’alors étant la nationalisation des chemins de fer. Cette grève sera durement réprimée avec 2000 licenciés sur les installations de Tours-Saint Pierre. Les licenciés seront même placés sur des listes « interdits d’embauche ». Les ateliers CGCEM vont alors embaucher une nouvelle main d’œuvre dont des ouvriers venant des pays de l’Est (Russes, Tchécoslovaques et Polonais). Rimailho va alors profiter d’une partie du terrain du camp de Grasse pour loger ces ouvriers étrangers. Le camp de Grasse prend dans le langage populaire le nom de cité Rimailho ou cité CGCEM. Sur le plan de Saint Pierre des Corps ci dessous, on trouve la trace de la cité CGCEM le long des voies ferrées (zone entourée en rouge).

plan-de-st-pierre1-les-4-a4-bisPlan de Saint-Pierre-des-Corps au début des années 30 – (c) Azo

Comme 85% de la ville de l’époque, le camp de Grasse disparaîtra sous les bombardements de la Seconde Guerre Mondiale. La reconstruction effacera les dernières traces de cette cité ouvrière et populaire, comme en témoigne le plan ci dessous de 1952. Quant aux employés des ateliers de réparation, ils devront attendre 1983 et de nombreuses années de lutte pour être intégrés au sein de la SNCF. Ce centre porte aujourd’hui le nom de technicentre.

plan-de-st-pierre2-les-4-a4Plan de Saint-Pierre-des-Corps en 1952 – (c) Azo

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