Gallimard sublime Chinon

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«Rabelais fait de son pays Chinon le centre du monde» peut-on lire page 105 : même si Gallimard n’a évidemment pas le monopole du guide touristique intelligent, force est de constater qu’avec ce «Chinon, voyage au pays de Rabelais» l’éditeur parisien force une nouvelle fois le respect – en s’attachant au passage les services de quelques plumes et illustrateurs/photographes locaux – et donne avec vigueur à une destination une autre dimension : celle d’un voyage qui se vit autant de l’intérieur que de l’extérieur. Un antidote goûtu au tourisme de masse, qui fait écho avec grâce et finesse à la célèbre préface de Topor au classique «Quel Monde !» du photographe britannique Martin Parr qui stigmatisait dès 1995 les touristes qui «font» une destination mais qui n’y comprennent rien…

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Pas besoin de prévoir un roman pour votre prochain petit séjour en Rabelaisie : ce petit ouvrage orange vous suffira (prévoyez-en un exemplaire chacun si vous vous baladez à plusieurs, du coup). On peut même vous la faire «mise en abîme» en citant ledit ouvrage qui cite Rabelais, extrait qui pourrait s’adapter à ce guide lui-même : «Il faut ouvrir le livre et peser soigneusement ce qui s’y trouve exposé. C’est alors que vous vous rendrez compte que l’ingrédient qui s’y trouve contenu vaut bien mieux que ne le promettait la boîte.»

Entendez donc ce «Voyage au Pays de Rabelais» à double sens : au sens géographique comme au sens littéraire. Et les deux mélangés en créant un troisième : si vous prenez le temps de dévorer la chose, vous découvrirez donc non seulement une ville et ses environs, mais aussi l’œuvre d’un auteur que vous ne connaissiez finalement que de loin et, last but not least, le lien complexe entre réalité source d’inspiration originelle et paysage fictionnel fantasmé retranscrit en mots.

Inventeur du roman français et premier punk de l’Histoire – excusez du peu – Rabelais se découvre ici au fil de chapitres originaux («La Rabelaisie ou la genèse d’un paysage imaginaire», «Le pantagruélion et la culture du chanvre en chinonais», «Boire et Chinon» (sic), «Boire chez Rabelais» avant le plat de résistance «La région vu par les peintres et les écrivains» où l’on passe avec délectation de Kundera à Debré, de Gracq à Laclavetine, ou de Richter à… Rabelais bien sûr, sans oublier ce légendaire courrier désespéré de Mérimée à un ministre, en 1854, sauvant in extremis le château de Chinon d’une destruction décidée par un conseil municipal apeuré par des questions de… sécurité (et oui, ça ne date pas d’hier).

Une fois rassasiés d’histoire et d’histoires, de belles images (revoir le Max Ernst par Cartier-Bresson est toujours un bonheur) et de bons mots, nous voilà fins prêts pour de belles balades digestives : quatre parcours, eux aussi encore ponctués de précisions littéraires et culturelles de haut vol. Et un final incontournable : la liste des domaines viticoles de l’AOC Chinon.

De quoi donner à n’importe quel casanier le goût du voyage !

Un degré en plus

> «Chinon, Voyage au Pays de Rabelais», Gallimard, Paris, 2017. 14,90 €

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